RAPPORT SUCCINT SUR L'ETAT DE MISE EN UVRE DES RECOMMANDATIONS,
RESOLUTIONS, DECISIONS, PLANS ET PROGRAMMES SUR LES LANGUES
AFRICAINES AU NIVEAU INTERGOUVERNEMENTAL : LE CAS DE L'O.U.A.
Par Marcel DIOUF.
1. La Charte de l'O.U.A. (1963)
L'article 29 de la Charte créant l'O.U.A. dispose que
les langues de travail de l'organisation sont, si possible,
les langues africaines ainsi que l'anglais, l'arabe, le français
et le portugais.
De 1963 à 1991, seuls les Chefs d'Etat d'Ethiopie ont
utilisé une langue africaine (l'Amharic) à l'O.U.A.
Ce document cependant, n'a jamais été
traduit dans une langue africaine.
2. Le Manifeste Culturel Panafricain d'Alger (1969)
Le Manifeste est le premier document adopté par une réunion
d'experts convoquée sous l'égide de l'O.U.A. qui
compte des recommandations sur la promotion des langues africaines.
L'essentiel de ces recommandations porte sur :
- un programme de traduction des uvres majeures de l'humanité
dans les langues africaines et des uvres africaines remarquables
dans les langues de grande diffusion internationale ;
- l'utilisation des langues africaines dans l'enseignement.
La mise en uvre de ces recommandations (traductions d'uvres)
est assez limitée.
3. Le Rapport Final de la Conférence Intergouvernementale
sur les Politiques Culturelles en Afrique (UNESCO-0UA) 1975
à Accra (Ghana)
Cette conférence peut être considérée
comme l'instance fondatrice des politiques culturelles (et linguistiques)
post coloniales en Afrique.
Les résolutions et la déclaration adoptées
à cette conférence relatives aux langues africaines
se sont traduites au niveau intergouvernemental par la création
ou le renforcement de centres régionaux tels que le CELHTO,
l'EACROTANAL, le CICIBA, le CERDOTOLA, etc.
4. La Charte Culturelle de l'Afrique adoptée par
l'O.U.A. en Juillet 1976 à Port-Louis (Ile Maurice)
Ce document combine le projet de Charte Culturelle proposé
par l'Institut Culturel Africain (I.C.A.) (pays et les recommandations
du Manifeste Culturel Panafricain d'Alger.
Les Trois (3) articles consacrés aux langues africaines
ont également eu un impact sur le développement
des centres régionaux, sans pour autant se traduire par
l'utilisation effective des langues africaines dans les instances
intergouvernementales. Ce document cependant a été
traduit par l'O.U.A. dans certaines langues africaines.
5. Le Plan d'Action de Lagos pour le développement
économique de l'Afrique (1980)
Ce document ne fait aucune référence à
la culture africaine, encore moins aux langues africaines qui
sont pourtant, des facteurs de développement.
6 Les résultats de la première Conférence
des Ministres Africains de la Culture de l'O.U.A. Port-Louis
(Ile Maurice -1986)
Cette conférence a adopté deux documents importants
qui sont :
a) Le Plan d'Action Linguistique pour l'Afrique élaboré
par le Bureau Inter Africain des Langues BIL/OUA (Kampala, Ouganda).
b) La Résolution N° 16 sur l'adoption du kiswahili
comme langue de travail de l'O.U.A.
Le rapport final et les résolutions adoptées à
cette conférence ont été entérinées
par le Sommet des Chefs d'Etat et de Gouvernement de l'O.U.A.
en Juillet 1986 à Addis-Abeba. Malheureusement,
- la résolution sur l'utilisation du Kiswahili n'a jamais
été appliquée ni par l'O.U.A, ni par aucune
autre organisation intergouvernementale africaine ;
- le Plan d'action linguistique n'a eu aucune évidence
visible sur les pratiques linguistiques des organisations gouvernementales
africaines ;
- le Congrès constitutif de l'Association Panafricaine
des Linguistes ne s'est jamais tenu malgré la convocation
de deux réunions préparatoires à Addis-Abeba
(1988) et Tunis (1993) ;
- le Bureau Inter Africain des Langues (BIL) créé
par l'O.U.A. à Kampala est dissout en 1987.
7.
Le Traité d'Abuja (Nigéria) créant la Communauté
Economique Africaine -1991
Ce document majeur (tout comme le Plan d'Action de Lagos) consacre
un recul par rapport à la Charte constitutive de L'O.U.A.
(1963). Il élimine les langues africaines parmi les langues
de travail de la Communauté Economique Africaine.
8. Le Plan régional de collecte des traditions
orales en Afrique Australe -1993 Hararé (Zimbabwé).
Ce plan régional adopté par une réunion
d'experts convoquée par l'O.U.A. n'a jamais été
mis en uvre et la proposition de créer un Centre
Régional équivalent au CELHTO, à l'EACROTANAL
ou au CERDOTOLA en Afrique Australe (OTASA) ne s'est jamais
concrétisé.
9. La conférence Intergouvernementale sur les politiques
linguistiques en Afrique (UNESCO-OUA-ACCT) Hararé (Zimbabwé)
-1997.
Les recommandations, la déclaration et le Plan d'Action
Linguistique pour l'Afrique adoptés à cette conférence
n'ont eu aucune incidence visible sur les pratiques linguistiques
des organisations intergouvernementales africaines. Au lendemain
de cette conférence, la Division des Langues à
l'UNESCO est fermée.
10. La redynamisation de l'EACROTANAL (1997)
Les initiatives de redynamisation de ce Centre Régional
basé à Zanzibar (Tanzanie) entamées dans
la mouvance de la conférence de Hararé (1997)
n'ont pas abouti.
11. Le Programme d'Action de la Décennie de l'Education
en Afrique (1999) Hararé, Zimbabwé
Les dispositions de ce document de l'O.U.A. relatives à
l'utilisation des langues africaines dans l'éducation
n'ont pas permis de modifier de façon significative les
pratiques des pays et des organisations du continent.
12. Le Traité créant l'Union Africaine (2000)
Lomé, Togo.
Ce document qui remplace la Charte de l'O.U.A. (1963) remet
en place la possibilité d'utiliser les langues africaines
comme langues de travail de l'O.U.A.
13. L'Académie Africaine des Langues
La création de l'Académie se justifie par les
lacunes signalées ci-dessus. Elle aura pour rôle,
entre autres, de déterminer les causes profondes de la
non utilisation des langues africaines dans les instances intergouvernementales
africaines, et les remèdes à apporter à
cette situation.
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